Vous avez tous constaté comme moi qu’en matière de chines il y a parfois des hasards stupéfiants qui mettent sur votre chemin en plusieurs exemplaires et en peu de temps quelque chose que vous avez cherché durant des mois voire des années sans trouver... C’est ainsi qu’un TROISIEME mannequin est entré dans ma maison !!! Un vrai Stockman plus ancien encore que la svelte silhouette de la décharge, à la toile noire et à la silhouette caractéristique de la fin du XIXe siècle, le ventre creusé, la taille très fine, inspirée de celle de l'impératrice Eugénie...
Je vous présente Adélaïde...
L’histoire des mannequins est passionnante et étroitement liée à celle des vêtements féminins. Saviez-vous que les premiers mannequins étaient en osier, puis en fil de fer et enfin en carton cousu, molletonné et recouvert de tissu. C’est à un tailleur pour dame, Alexis Lavigne, inventeur du mètre ruban et d’une école de couture qui existe toujours sous le nom d’Esmod, que l’on doit cette invention qui va révolutionner le monde de la couture et ensuite l’industrie du vêtement lorsqu’interviendra un de ses anciens élèves, Frédéric Stockman, qui fera passer la fabrication des mannequins d'un stade artisanal à industriel en les standardisant. Mannequins hommes et femmes sont numérotés, le chiffre correspond à la moitié du tour de poitrine, pour les enfants, le chiffre fait référence à l’âge. Si en 1865, M.Lavigne vendait une cinquantaine de bustes par an, en 1900, plus de 30 000 sont écoulés dont la majorité porte la signature Stockman...
Si vous voulez en savoir plus sur cette réussite exemplaire, lisez cet article passionnant...
(Merci à Peggy de “La malle ô bidulles” chez qui j’avais trouvé ce lien.)
Sur cette belle silhouette, un autre de mes cols, en organdi brodé et dentelle de Valenciennes fermé par un bouton en métal ancien orné d’une fleur de fuchsia, un long sautoir en rocaille de jais début XXe donné par ma belle-mère et un chapelet en nacre chiné. C’est la reine Victoria qui lança la mode des bijoux de deuil en jais, cette matière fossile proche du charbon composée à 70-75% de carbone pur dont la dureté permet le polissage. Il y avait des mines de jais ou “jayet” en France et toute une industrie, notamment en Ariège, qui déclinera avec différents facteurs, entre autres la perte des coutumes de deuil et la concurrence de nouveaux matériaux: le verre teinté de Bohême, la galalithe puis le plastique... Le jais était utilisé pour des bijoux ainsi que de nombreuses parures et plus couramment pour les boutons jusqu’en 1930.
Adelaïde veille sur le palier de repos de l’escalier à côté d’un miroir. Une fine guirlande de roses drapée sur celui-ci accentue le romantisme de l’ensemble ainsi qu’une bourse en toile de soie brodée doublée de moire rose chinée récemment à Tarbes, d’une fraîcheur exceptionnelle et dont le rapprochement avec le mannequin s’est imposé comme une évidence...Un plaisir chaque fois que nous empruntons l'escalier...
Grâce à Angélique, brodeuse émérite, j'ai appris que cette jolie bourse ancienne est brodée au point de Beauvais, un point très solide qui nécessite un vrai savoir-faire dans le maniement du crochet nécessaire à son exécution... Une découverte pour moi, car j'ignorais l'existence de ce type de broderie...
Dès 1890 les pieds tournés en chapelet des mannequins destinés à être posés au sol (une succession de boules, voir la publicité en début du post précédent, les deux mannequins de droite ont un pied en chapelet) commencent à laisser place au pied en balustre qui est devenu et resté depuis, le standard...
Un jour, peut-être trouverai-je un Stockman enfant, ou un buste de comptoir idéal pour présenter encore un de mes cols ou encore un de ces fabuleux mannequins prolongés par une jupe d’acier tels que celui de droite sur la photo ci-dessous...
http://littleemmaenglishhome.blogspot.com
Les prénoms que j'ai donnés à mes mannequins n'ont pas été choisis au hasard,
ce sont des prénoms usités dans ma famille fin XIXe et début XXe siècle !
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